Il ne faut pas grand chose pour satisfaire la vie d’un lecteur. Un beau livre, une belle couverture et surtout le retour d’auteurs que l’on apprécie énormément depuis leur premier roman. C’est le cas aujourd’hui avec l’arrivée en librairie du troisième roman de Ludovic Manchette et Christian Niemiec, À l’ombre de Winnicott, publié aux Éditions Le cherche midi. Si vous appréciez l’ambiance gothique et les personnages savoureux, alors n’hésitez plus.

La 4eme de couverture

Sussex, Angleterre, 1934. Alors qu’ils viennent d’emménager dans le manoir de Winnicott Hall, Archibald et Lucille Montgomery confient à Viviane Lombard, une Française à l’attitude et au franc-parler peu ordinaires, l’éducation de George, leur jeune fils aveugle. Tandis que la préceptrice et l’enfant apprennent à s’apprivoiser, un doute s’instille peu à peu chez eux comme chez tous les habitants de la vaste demeure, maîtres des lieux et personnel confondus : une présence invisible ne rôderait-elle pas entre les murs de la vieille bâtisse ?

À l’ombre de Winnicott : un roman d’ambiance

Après être allé du côté du roman policier, de la quête initiatique et du road-trip, Ludovic Manchette et Christian Niemiec s’attellent à rendre hommage à un genre que l’on ne voit plus aussi souvent, celui du roman gothique. Et autant vous dire que c’est une très belle réussite, tant les deux romanciers réussissent à nous faire vivre un tas d’émotions aux travers de ces quelques chapitres. Bien évidemment, on retrouve ce qui fait la marque de fabrique, la force et la réussite de ce duo, puisqu’À l’ombre de Winnicott s’offre à nous comme un véritable roman à l’écriture cinématographique. Impossible de ne pas réussir à se repérer dans les dédales de ce manoir bourgeois, de ne pas mettre un visage sur chacun des personnages et de ne pas ressentir l’ambiance particulière qui a été mise en place.

Ludovic Manchette et Christian Niemiec ne font pas dans la parodie et on sent qu’ils se sont réellement imprégnés de cet univers si particulier pour rendre le plus bel hommage, tout en faisant quelques clins d’œil à de grandes oeuvres du genre. Ici, on ne fait pas dans la surenchère de scènes d’épouvantes. Les deux auteurs prennent leur temps pour nous faire vivre dans ce lieu si particulier. Les anomalies arrivent par petites touches, si bien que l’on ne distingue pas toujours que nous sommes face à des événements fantastiques. On se laisse porter par le roman, par les bruits du manoir, par les portes qui grincent, par le parquet qui craque, par les vagues de froid qui s’insèrent dans les pièces. À l’ombre de Winnicott prend son temps, joue avec son lecteur, fait monter la tension et la peur de façon progressive. On découvre certaines choses, on n’en oublie d’autres, les fantômes du passé semblent s’amuser aussi avec les personnages et tentent de faire passer quelques messages. Entre temps, on s’amuse de certaines situations, de certains comportements et des réactions cartésiennes des autres. Ludovic Manchette et Christian Niemiec nous offrent un moment de plaisir littéraire, le genre qui se lit tout seul sous une couette ou au pied d’un feu.

À l’ombre de Winnicott : la beauté des émotions

Si le roman prend son temps, c’est aussi pour frapper fort et pour nous faire passer un moment intense avec chacun des personnages. Il est impossible de ressortir de cette lecture sans avoir un pincement au coeur, sans s’être attaché à chacun d’entre eux. Les deux romanciers savent comment s’y prendre et comme pour les précédents romans, ce sont réellement les personnages qui font l’intensité et le sel de l’histoire. On suit avec délice leur quotidien, leur discussion faites de quiproquo, de sous-entendu et de malice. On s’amuse avec eux et on ne veut plus les quitter. Si chaque protagoniste est intéressant à suivre, on s’attache bien évidemment bien plus au petit Georges et à Vivianne. Ils apprennent à se connaître sous nos yeux, à se dompter et autant vous dire que c’est un réel régal. Leur complicité nous touche en plein coeur et les sujets qu’ils peuvent aborder sont si beaux, si universel que l’on ne peut s’empêcher d’y réfléchir à notre tour.

Parce que si À l’ombre de Winnicott fonctionne aussi bien sur nous, c’est aussi par les thématiques qu’ils abordent avec justesse et émotions. Ludovic Manchette et Christian Niemiec évoquent la question de la solitude, de l’handicap, de la résilience, de l’amour, du deuil, de la vie après la mort. En bref, de la vie par toutes ses coutures. C’est simple, on grandit en lisant ce roman et on passe de l’ombre à la lumière en seulement quelques lignes. Il y a une humanité forte qui ressort de cet écrit, on ressent l’amour et la complicité que les auteurs ont pour leur proche, pour leur personnage. Je l’ai déjà dit précédemment, mais À l’ombre de Winnicott nous touche en plein coeur et ce n’est pas la dernière partie qui me fera dire le contraire. Les larmes ont coulé face à cette conclusion où le passé, le présent et le futur se sont entrechoqué. Les morts restent avec nous et c’est souvent pour le meilleur.

En bref, À l’ombre de Winnicott de Ludovic Manchette et Christian Niemiec nous ensorcelle

Vous l’aurez compris, À l’ombre de Winnicott de Ludovic Manchette et Christian Niemiec est un énorme coup de coeur de mon côté. J’ai été pris dans cette ambiance gothique parfaitement maîtrisée et j’ai pris un plaisir intense à suivre ces personnages dans leur quotidien et dans les péripéties qu’ils ont vécu. J’ai été touché par la puissance des mots, par la relation entre certains personnages et par les messages véhiculés par les deux romanciers. À l’ombre de Winnicott, c’est le roman plein d’émotions que je n’attendais pas et qui a touché en plein dans le mille. Préparez vos mouchoirs, allez en librairie et procurez-vous cet incroyable roman.