Les yeux doux d’Éric Corbeyran et Michel Colline : Big Brother is watching you

le

C’est aussi la rentrée dans le monde de la Bande Dessinée et je pense pouvoir dire, sans trop m’avancer, que je tiens l’un de mes coups de cœur de l’année avec Les Yeux doux d’ Éric Corbeyran et Michel Colline publié aux Éditions Glénat. Laissez-vous embarquer dans ce récit rétro-futuriste et dystopique ! 

Résumé :

Produire, consommer, contrôler : bienvenue dans notre Société !

Dans un monde dystopique où les usines crachent leur épaisse fumée, les pin-up des « Yeux Doux » veillent… Aucun délit n’échappe à leurs regards langoureux et menaçants depuis qu’une compagnie de surveillance a choisi ces femmes comme logo ! Au milieu des affiches de propagande, Anatole est rivé devant les écrans de surveillance. Employé modèle, sa vie bascule le jour où il repère une jeune voleuse qu’il dénonce sur-le-champ !

Les yeux doux : Big Brother is watching you

Il suffit d’une pleine page pour nous immerger immédiatement dans l’univers visuel de Michel Colline et une autre pour comprendre où l’on met véritablement les pieds. Les Yeux Doux nous embarque dans un monde qui nous rappelle en quelques coups d’œil des longs-métrages comme Blade Runner ou encore Brazil. On admire le travail, on s’immerge totalement dedans et l’on découvre par la suite les premiers mots que pose Éric Corbeyran dessus. On tombe alors sur l’un des personnages principaux travaillant dans une usine, si immense, que les individus sont minuscules, perdus dans la masse salariale, dans ces chaînes de production qui ne terminent jamais et qui sont à la fois un rappel des mines de charbon et des Temps modernes. Le vertige est présent et l’est encore plus, une fois que l’on comprend le côté inhumain de l’entreprise. En voulant aider ses collègues et éviter un drame, Arsène se fait licencier devant les autres. Il perd ainsi son matricule, son seul gagne-pain et sa dignité face au reste du monde. Celui-ci devient invisible aux yeux de la société, si bien que les auteurs le retranscrivent par la suite de façon littérale…

Dans Les Yeux doux, c’est le travail, la consommation et la surveillance qui priment sur le reste. Les individus se transforment en une masse qui se laisse faire et les auteurs décrivent un monde orwellien où la liberté d’agir n’existe plus. On sent alors la méfiance et la peur dans chacun des regards. La suspicion fait rage et les individus ne s’occupent plus des autres et de leur problème. Le but ici est de ne pas faire de vague et de continuer à vivre sous la surveillance des yeux doux. C’est ici également que le travail de Michel Colline est impressionnant, puisqu’il arrive à apporter du détail dans les moindres cases. On s’attarde ainsi de longues minutes pour découvrir les expressions des personnages présents dans la foule, pour admirer le paysage urbain qui ne s’arrête jamais. Tout finit par devenir inquiétant et la tristesse se lit sur chacun des visages. 

Mais Éric Corbeyran et Michel Colline ne font pas de cette bande dessinée un titre horrible, renvoyant à nos peurs. Au contraire, les deux compères confèrent une certaine poésie à cette histoire et aux personnages, que ce soit dans leurs actes, mais aussi dans leurs expressions. On tombe alors encore plus sous le charme de ce titre. Les Yeux doux dispose d’une certaine magie et de cette fougue qui se réveille petit à petit chez tous nos personnages. On s’attache à eux, à leur côté un peu gauche, à cette faculté de rebondir après avoir tout perdu et de retrouver goût à la liberté, à l’amour. Les deux auteurs offrent un début de lutte contre le système en place, d’une révolution qui divise les camps. Entre ceux qui réfléchissent et ceux qui veulent passer à l’action. Impossible dès lors de ne pas se mettre en tête qu’Albert Dupontel aurait les épaules assez larges pour en faire, dans quelques années, une merveilleuse adaptation sur grand écran. 

En bref, Les Yeux doux d’Éric Corbeyran et Michel Colline est une bande dessinée magistrale

Vous l’aurez compris, j’ai été subjugué par le travail derrière Les Yeux doux d’Éric Corbeyran et Michel Colline. L’objet en lui-même est d’une qualité incroyable et l’histoire n’est pas en reste. On s’immerge totalement dans cet univers graphique et poétique, tant les auteurs réussissent à donner vie à leurs idées. On découvre ainsi un monde totalitaire et capitaliste qui peut aisément nous renvoyer à notre société de consommation, si bien que l’on ouvre les yeux durant notre lecture. Une œuvre magistrale à mettre entre toutes les mains. Et si cela peut vous rassurer quant à la qualité du titre, sachez qu’elle a obtenu le Prix RTL de la BD en partenariat avec Cultura. 

Rejoignez les 1 213 autres abonnés

3 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Avatar de laplumedelulu laplumedelulu dit :

    On a bien saisi le coup de cœur. Merci à toi pour la chronique 🙏 😘

    Aimé par 1 personne

    1. Avatar de tomabooks tomabooks dit :

      Merci à toi ! Si jamais tu as un cadeau de Noël à faire pour un amateur de SF, n’hésite pas !

      J’aime

      1. Avatar de laplumedelulu laplumedelulu dit :

        Bien Monsieur, c’est noté. 😊

        J’aime

Laisser un commentaire