
Certains romans sont considérés comme des mastodontes de leur genre respectif, si bien qu’ils deviennent un passage obligatoire pour les amateurs et/ou les gros lecteurs. C’est le cas ici avec Le Tueur intime de Claire Favan disponible au format poche aux Éditions Pocket. Je ne peux pas réellement expliquer pourquoi je n’avais pas franchi le pas, alors que le roman attend dans ma bibliothèque depuis quelques années. La course aux nouveautés qui empêchent parfois de lire des titres plus anciens, la peur d’affronter un récit avec un tel aura ou la peur de ne pas aimer et d’être à contre-courant des autres, de subir la foudre des admirateurs. En tout cas, j’y suis allé sans me mouiller la nuque. J’ai affronté la bête et j’en suis ressorti changé.
La 4eme de couverture
Attention ce roman n’est pas à mettre entre toutes les mains. Vous allez entrer dans la tête du tueur… et avec Will Edwards vous n’en sortirez pas indemne. On vous aura prévenu !
À quinze ans, Will a déjà conscience de sa différence. Solitaire, maltraité, il jette son dévolu sur une de ses camarades de classe. Ce qui n’aurait dû rester qu’une banale amourette devient une véritable obsession pour celui qui se révèle déjà comme un prédateur redoutable. Car Will est un tueur en série en devenir qui se construit pas à pas. Lorsqu’il estime le temps venu de livrer ses victimes au monde, il part sur les routes des États-Unis. Sa signature déroutante ne tarde pas à attirer l’attention du FBI. Pourtant, l’enquête de l’unité spéciale s’enlise. Un nouveau profiler, RJ, arrive alors en renfort dans l’équipe. Tous les espoirs reposent sur lui pour démêler les mises en scène de ce tueur diabolique.
Le Tueur intime : une autrice qui taquine les américains
S’il y a bien une chose qui me vient à l’esprit pendant que j’écris mon avis, c’est bien la capacité qu’à eu Claire Favan pour nous immerger totalement dans son thriller fleuve. Celle-ci nous offre la possibilité de suivre le parcours entier d’un tueur en série, que ce soit dans les prémices de sa naissance ou dans sa pleine puissance. Si la taille du roman peut faire peur, l’autrice réussit parfaitement à ne pas nous lâcher, à jouer sur sa tension constante pour nous maintenir dans une torpeur incroyable. C’est simple, Le tueur intime se lit comme on pourrait regarder une bonne série TV. Tous les ingrédients sont présents pour nous faire “passer un bon moment”. On serait presque dans du divertissement très noir qui nous pousse à toujours aller plus loin, à nous enfoncer dans l’horreur et dans la noirceur de l’être humain.
Bien évidemment, on sent que le roman a pris dix années dans la tronche et que d’autres auteurs sont passer par là, que certaines modes ont pris plus d’espace sur nos tables en librairie et dans nos bibliothèque. Lire Le Tueur intime, c’est avoir cette sensation nostalgique de redécouvrir un vieil épisode de la série Esprits criminels et de prendre part à l’enquête et au travail psychanalytique pour comprendre notre tueur en série. En continuant la comparaison en termes de série TV, on pourrait dire que Claire Favan prend son temps, décortique le moindre aspect de la psychologie, du quotidien pour nous offrir une saison complète au sein de cette unité.
Pour couronner le tout, la romancière nous propose de suivre des personnages complexes, certains à fleurs de peaux, d’autres en proie à des pulsions, à des fantasmes qui apportent un autre intérêt à l’ensemble de cette histoire. On a l’impression de côtoyer ces personnes depuis des années, tant Claire Favan nous immerge au sein de cette cellule d’enquête. Celle-ci nous donne la possibilité de suivre les raisonnements en temps réel, de comprendre la psyché du tueur, de tenter de mettre des mots sur l’horreur. On a d’ailleurs parfois une longueur d’avance, mais la romancière joue quand même avec son lecteur et nous offre des rebondissements que l’on avait du mal à voir venir.
Le Tueur intime : au coeur de la bête
On ne va pas se mentir, ce qui fait le succès du roman Le Tueur intime réside dans le travail minutieux que nous a offert Claire Favan. Celle-ci, en retraçant la vie d’un tueur en série, nous offre la possibilité de suivre le parcours d’un personnage hors norme, que l’on va détester, que l’on va trouver horrible, inhumain, mais dont on ne pourra pas s’empêcher de suivre ses actions et ses agissements jusqu’au bout et avec un intérêt qui fait froid dans le dos.
Nous avons ici affaire à un personnage froid, calculateur, séducteur et particulièrement sadique. L’autrice joue avec nous, comme pourrait le faire son antagoniste. Elle prend son temps, nous immerge parfois dans un quotidien banal, si bien que tout devient un potentiel danger. Le tueur peut être partout et nulle part à la fois. Il peut être derrière nous ou au coin d’une rue en train de nous observer. Il attaque sans prévenir et une fois qu’il est sous nos yeux, il est trop tard. Dans Le Tueur intime, Claire Favan ne lésine pas sur les scènes chocs, sur les petits détails qui pourront marquer le lecteur à tout jamais, mais sans pour autant faire dans le sensationnel. On découvre les scènes de crimes avec la froideur de la cellule d’enquête et on essaie de se détacher de la barbarie qui s’offre à nous.
Comme à son habitude, la romancière va questionner son lecteur et va faire jouer son empathie tout au long du roman. Avec Le Tueur intime, on se demande si l’on devient un monstre ou si on l’est depuis la naissance. Claire Favan a très bien compris cet enjeu, puisqu’elle nous travaille dès les premières pages et dès les moments évoquant la jeunesse troublante et troublée de ce jeune garçon qui se construit dans la violence familiale et dans le harcèlement scolaire. Cette question reste en tête, elle tourne en boucle, alors que l’on subit les attaques de cet homme, de cette bête avide de souffrance, de domination, de cruauté et de mort.
Alors, On naît monstre ou on le devient ?
Vous l’aurez compris, Le Tueur intime se démarque des autres romans et des autres divertissements par sa façon qu’à son autrice, Claire Favan, de décortiquer ce qui fait de nous des monstres. Avec ce roman aussi passionnant, que prenant, la romancière nous plonge dans une enquête fleuve pour mieux nous prendre dans ses filets. C’est un roman qui se dévore et qui se déguste à la fois. On en prend plein les yeux, on ne fait qu’un avec ce monde de douleur durant quelques jours et je dois bien admettre que l’on a du mal à en ressortir rapidement. L’autrice a marqué le thriller français et le marque encore aujourd’hui de son empreinte. N’ayez pas peur, lisez Le Tueur intime et ce sera le coup de cœur de votre année, si ce n’est plus.
Je suis en pleine relecture depuis que j’ai vu que tu l’avais sorti de ta pal. Ta chronique est top. Merci à toi 🙏 😘
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