Chronique CD

TOOL – Fear Inoculum (2019)

Si on m’avait dit un jour que je chroniquerais un nouvel album de TOOL sur le blog, je ne pense pas que j’y aurais cru… Pour tout vous dire, je crois que je n’y crois pas encore. Pourtant, j’ai pu les voir pour leur premier concert en France depuis 2006 sur la scène du Hellfest à Clisson. J’ai pu écouter plusieurs fois ce nouvel album, mais rien n’y fait. Je suis encore abasourdi, comme absorbé par ce groupe.
Je ne sais vraiment pas si je vais y arriver. Je ne sais pas si vous avez déjà ressenti cela, mais j’ai l’impression d’être devant un gouffre. J’ai le vertige, j’ai peur de mes mots, de mes sentiments envers cet album.Vous l’aurez compris, cette chronique CD sera aussi une expérience personnelle pour moi. 

13 ans d’attente depuis la sortie de 10 000 days pour voir arriver ce nouvel album au doux nom de Fear Inoculum. 13 ans à attendre, à espérer un retour, un signe divin. Pourtant, il y en a eu, mais ce n’était jamais sérieux. Toujours à la limite du troll de la part de Maynard James Keenan. Les fans, les membres de la secte TOOL avaient même peur que Maynard soit trop accaparé par Puscifer, A Perfect Circle et son domaine viticole pour revenir réellement avec TOOL.
J’ai commencé à y croire quand le groupe a programmé une tournée européenne et encore plus quand ils ont été annoncés au Hellfest. J’attendais la date de sortie de Fear Inoculum avec impatience. Le premier single est sortie et j’étais déjà sûr que TOOL allait faire du TOOL. La question que je me suis alors posé avant d’enclencher mon lecteur était de savoir ce qu’on attendait réellement du quatuor. Une évolution artistique ? Une continuité au grandiose Lateralus ? Tout ce que je peux vous dire, c’est que toute cette attente valait vraiment la peine. 

TOOL – Fear Inoculum

Comment évoquer la musique de TOOL pour celles et ceux qui ne connaissent pas ? TOOL, c’est comme un serpent à la taille infini qui s’entortille, une anguille qui ne cesse de s’échapper, qui est partout, qui se glisse en vous. C’est une musique qui se vit, qui se ressent et qui joue avec nos sens. TOOL parle à la fois à notre esprit, à notre corps et à notre âme.
Le groupe montre que Fear Inoculum est le parfait rejeton de la famille et que celui-ci brouille toujours autant les pistes quant à la définition de sa musique. On est loin du groupe que l’on entend tous les jours sur les ondes ou sur CD. Les membres de TOOL navigue toujours avec autant d’aisance entre le psychédélisme, le Metal alternatif, le rock progressif et l’art pour nous offrir quelque chose d’unique, un art global.
Je dirais que Fear Inoculum va facilement ravir les fans, les membres de la secte de la première heure. Bizarrement, je vais aussi dire ça pour les nouveaux, ceux qui découvrent TOOL sur le tard, car ce Fear Inoculum est étonnamment accessible, comme peut l’être un album de A Perfect Circle, mais la comparaison s’arrête ici tant la musique de TOOL est toujours aussi envoûtante. 

On pouvait se poser la question sur la réelle envie de faire un nouvel album et sur l’alchimie entre Maynard James Keenan, Adam Jones, Danny Carey et Justin Chancellor, mais dès le premier titre (Fear Inoculum) on sait que l’envie musicale est là. L’album démarre comme un concerto classique avec cet effet violoning proposé par Adam Jones et cette arrivée progressive des autres musiciens et plus particulièrement des rythmes orientaux dont Danny Carey a le secret. Certains pourront reprocher le manque d’audace sur ce premier morceau, ressemblant fortement à ce que TOOL avait pu proposer sur Lateralus, mais objectivement je suis conquis par cette grandeur à la fois lumineuse et sombre.
La suite de cet album n’est que magnificence, notamment avec le deuxième titre Pneuma qui mélange avec habileté les genres et les influences que le groupe a su engranger depuis le début des années 90. On passe facilement des influences tribales de Danny Carey pour finir sur une rythmique massive digne d’une composition digne des plus grands morceaux de rock progressif avec ce qu’il faut d’obscure qui termine ce titre en beauté. Pneuma donne l’impression de marcher en rythme quasi militaire dans un endroit dévasté, notamment dans ses moments plus calmes. Puis vient Invincible que le groupe avait déjà pu nous faire écouter en live où on se surprend à avoir l’impression d’être dans un couloir aux portes infinis, notamment grâce à l’introduction hypnotisante d’Adam Jones. Les sonorités du groupe finissent par rebondir de paroi en paroi jusqu’à l’entrée dans une zone, une pièce de calme orchestrées par la basse de Justin Chancellor et le travail de Danny Carey, prouvant ainsi que nous avons l’un des meilleurs duo rythmique dans les oreilles. Le final qui se termine sur une partie totalement instrumentale où le groove règne en maître. La rythmique est millimétrée, mathématique et d’une maîtrise incroyable.

Bien sûr, Fear Inoculum dispose d’un morceau rappelant fortement leur marque de fabrique et ce morceau n’est autre que Descending qui joue sur la tension permanente qui change plusieurs fois d’harmonies et de rythmiques. On pourrait s’attendre à que tous ces changements provoquent un chaos sans nom, mais il n’en est rien puisque TOOL maîtrise et contrôle ce morceau d’une main de maître. C’est complexe, parfois insaisissable, exactement comme le groupe en lui-même. Ce sera sans doute l’un des morceaux phares de cet album, mais aussi le plus complexe pour celles et ceux qui ne connaissent pas encore trop le groupe. C’est une plongée dans notre âme où l’on ne ressort pas indemne.
On retrouve également dans cet album cette envie de ne pas faire comme tout le monde. L’album est toujours changeant, tantôt calme et aérien, puis massif, incontrôlable. TOOL nous offre, sans aucun doute, l’un des meilleurs albums de ces dernières années

Alors que le morceau Culling Voices fait office de pause dans cet album, de calme et de montée progressive tout cela grâce à la palette vocale de Maynard James Keenan, le morceau Chocolate Chip Trip arrive comme une expérience sensorielle où tous nos repères ont disparu. Ce titre donne l’impression que le labyrinthe de Fear Inoculum se referme sur nous et qu’une menace invisible ne cesse de nous pourchasser. Chocolate Chip Trip est à la fois psychédélique, expérimentale avec des sonorités électroniques, pour ainsi nous faire vivre une énorme pression, le tout appuyé par un solo de batterie dont seul Danny Carey peut nous gratifier.
Puis vient la claque qu’on attendait tous avec 7empest avec ses 15 minutes de colère, d’angoisse orchestrés par l’ensemble du groupe. Le tempo s’intensifie pour se rapprocher de ce que le groupe pouvait proposer de plus sale avec son premier album Undertow. Maynard James Keenan se lâche sur morceau et donne envie de vivre ce moment en live. Le chanteur harangue la foule, scande son message d’une colère impressionnante. Le groupe semble nous montrer qu’il prend le contrôle de l’ensemble de cet album rien qu’avec ce morceau et ce pour notre plus grand plaisir. TOOL est arrivé au stade de la maturité, du contrôle total de ce qu’il peut proposer.

Alors, que dire de plus au final pour vous donner envie de vous jeter sur ce Fear Inoculum ? Pas grand-chose au final, à part peut-être de ne pas prendre en compte tout ce que j’ai pu vous dire ici. Comme à son habitude, TOOL offre un album qui se vit, qui se ressent, qui vibre au fond de nous. Un album que l’on doit s’approprier de manière personnelle. Il suffit de vous laisser embarquer par la promesse faite dans le premier morceau, celle que vous trouverez quelque chose à sa toute fin. Le groupe vous invite à réfléchir sur vous-même, à vous retrouver et à ne faire qu’un avec vos sentiments. TOOL vient tout simplement de nous offrir la plus belle des récompenses après 13 longues années d’attente. 

Clip audio du morceau titre Fear Inoculum
Clip audio du morceau Invincible
Clip audio du morceau 7empest

12 réponses »

  1. Bravo Tomabooks tu as trouvé les bons mots pour ta chronique toolesque, même si la trop longue attente pourrait rendre la critique consensuelle, Tool a fait un album grandiose et la vraie évolution c’est d’avoir rendu leur musique exigeante accessible à tous. Pas que pour les puristes ou les fans absolus, de la musique façonnée, élaborée comme un gigantesque tableau de maitre.

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    • Grand merci pour ton commentaire qui me fait plus que plaisir ! J’avais vraiment peur de ne pas savoir placer mes mots pour parler de cet album et je dois dire que tu me rassures. Tu as tout dit avec cette seule phrase, TOOL s’ouvre au public, tout en étant toujours aussi exigeant. Il n’y a qu’à entendre les 15 minutes de 7empest où Adam Jones est au sommet de son art 🙂

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  2. Si je m’attendais à tomber sur un article parlant de Tool en regardant ma veille littéraire ! ^^ Un bon moment que je n’en ai pas écouté, je vais aller me faire un avis sur leur petit dernier ! 😀

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  3. Je suis fan de tool depuis leur début et j’attendais cet album avec impatience. Quel album, je l’adore. Mention particulière pour la chanson Pneuma qui m’a mis une claque énorme dès la 1ère écoute. Un album à posséder sans hésitation. Tool est de retour.

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    • La première écoute a été tellement forte, peut-être un peu moins que le concert au Hellfest, mais c’est pas encore la même chose. Je dois dire que j’ai pris une sacrée claque avec 7empest !Je ne m’attendais absolument pas à ce magnifique morceau de 15 minutes… C’est tellement bon de vivre ce genre d’écoute 🙂

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