Islander – Tome 1 de Caryl Férey et Corentin Rouge : BD d’anticipation sur la crise climatique

En 2021, Cary Férey et Corentin Rouge nous offraient la possibilité de nous immerger dans une Afrique du Sud en crise et en conflit. Une occasion parfaite pour le duo de nous donner un polar dense, exploitant avec brio une réalité sociale brutale et une Histoire complexe qui perdure encore.
C’est en 2025 que les deux artistes reviennent pour nous offrir un triptyque d’anticipation s’intéressant au sujet des réfugiés climatiques et de toutes les tensions que cela va engendrer. Avec Islander, publié aux Éditions Glénat, Caryl Férey et Corentin Rouge nous offrent une bande dessinée à l’aspect cinématographique et aux questionnements multiples. 

Le résumé 

Futur proche

Le continent européen est victime de catastrophes multiples, des réfugiés de tous les pays s’amassent au port du Havre, lieu de transit vers un hypothétique salut. L’Islande est encore épargnée, mais pour combien de temps ? Liam, qui a déjà tout perdu, va tenter sa chance en subtilisant le pass d’une migrante, sans savoir que l’Islande aussi se déchire à leur sujet. Ballotté dans le chaos du monde, Liam découvrira qu’il a pris la place d’une femme impliquée dans un mystérieux projet, « Islander » ; sa rédemption, si Liam et ses nouveaux compagnons parviennent à survivre.

Le réchauffement climatique est sur toutes les lèvres depuis de nombreuses années. Nous sommes mis en garde depuis des décennies et pourtant rien ne semble se passer… C’est avec ce constat que Caryl Férey nous offre une bande dessinée d’anticipation, mais qui pourrait, par la force des choses, devenir réelle dans peu de temps. Ce premier tome d’Islander prend place dans une Europe fatiguée par la crise climatique et par toutes celles qui ont découlé de ces événements. Notre continent est en fin de course, instable et voit son territoire se transformer en zone d’attente pour des émigrés tentant de rejoindre certaines terres promises au nord du continent. Il suffit à Corentin Rouge de quelques pages pour nous présenter le port du Havre et pour nous faire comprendre toute l’ampleur du désastre qui se joue sous nos yeux. Les migrants ne viennent plus de l’Europe de l’est, du continent africain, du Moyen-Orient ou d’autres pays pauvres, mais bien des pays riches. Tout est remis en question, on se projette et on comprend alors toutes les problématiques qu’ils doivent endurer pour tenter de survivre…

Islander se démarque par l’écriture de Caryl Férey. Celui-ci s’inspire de son travail d’auteur de roman policier pour nous immerger dans une société à la dérive, en proie à la violence et au désespoir. Il a su capter de façon pertinente toutes les problématiques à venir si un tel événement devait se produire. La société s’effondrerait et les plus forts prendraient le pouvoir par la force. L’auteur va à l’essentiel et pourtant, celui-ci nous offre un univers tangible où les camps de migrants bondés sont tenus par l’armée, où une résistance se forme et où la politique se déchire entre les partisans de l’humanité et les partis xénophobes qui prennent de plus en plus de place dans la société.
Cependant, Cary Férey n’oublie pas de nous offrir un pur divertissement et sait comment s’y prendre. Le rythme est intense et on sent que l’auteur a encore de nombreuses choses à dire pour la suite. Les pions se mettent en place, certains personnages prennent de l’ampleur au fur et à mesure des cases et les questionnements vont bon train. On déguste alors cette bande dessinée comme un véritable film catastrophe, ce qui permet de faire passer la pilule. 

Ce premier tome d’Islander prend alors la forme d’un survival, voire d’un western crépusculaire, tant on Corentin Rouge se permet de laisser de la place aux vastes paysages enneigés, mais surtout vide de toute vie. La BD se veut être une fuite en avant qui nous laisse que peu de répit dans cette aventure, mais qui dispose tout de même d’un peu d’espoir. Celui-ci est apporté par certains personnages qui ne sont pas ici par hasard, entre l’anti-héros au grand cœur, le scientifique qui aurait une solution à tout cela et une famille islandaise prête à tout pour sauver leur pays de la xénophobie. 

Mais tout cela ne serait rien sans le travail incroyable de Corentin Rouge au dessin. Celui-ci réussit à nous offrir un réalisme qui nous embarque dans cette aventure, tout en jouant sur les cadres pour nous faire ressentir toutes les émotions des protagonistes. On ressent ainsi tout le désespoir, la fatigue, la peur et parfois la haine avec seulement un plan sur les yeux. Le dessinateur nous immerge dans cet univers avec une facilité déconcertante et nous offre une vision d’une Europe en crise aussi glaçante que terrifiante. 

Vous l’aurez compris, le premier tome d’Islander a su me marquer par le dessin de Corentin Rouge, mais également par le travail d’orfèvre de Caryl Férey au scénario. Celui-ci a su retranscrire en quelques pages toutes les problématiques des crises migratoires dues à l’environnement, tout en nous offrant un divertissement de qualité. On passe par toutes les émotions avec ce premier tome et on peut être sûr que la suite sera du même niveau. En tout cas, je vous invite fortement à jeter à cette bande dessinée qui pourra ravir aussi bien les amateurs de BD Franco-Belge que les amateurs de roman d’anticipation. 

SCENARISTE : CARYL FÉREY
DESSINATEUR : CORENTIN ROUGE
COLORISTE: CÉLINE LABRIET
Date sortie : 22 janvier 2025
Pagination : 160 PAGES
EAN : 9782344043042
Prix : 25 €

2 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Avatar de Yvan Yvan dit :

    Une belle réussite, on est d’accord !

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  2. Avatar de laplumedelulu laplumedelulu dit :

    La couverture est magnifique, et Yvan valide. Merci à toi pour la chronique 🙏 😘

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